Paul Walsh, Président Directeur Général de Diageo

8 mars 2010 - Jean-Louis Laboissière

Voici ce que la presse britannique appelle un « tycoon ». Comprenez un homme d’affaires très important. Terme qui n’est pas usurpé concernant Paul Walsh, PDG depuis janvier 2000 de Diageo. Le numéro un mondial des spiritueux crée en 1997 par la fusion des sociétés Grand Met et Guinness est propriétaire de Smirnoff, J & B, Johnnie Walker, Baileys ou encore Gordon’s. Sans oublier la fameuse bière Guinness...Le groupe affiche 10,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires pour 1,85 milliard d’euros de résultat net. Quand le bénéfice de son principal rival Pernod Ricard ne dépasse pas le milliard d’euros pour 7,2 milliards d’euros de ventes.

Golfeur à ses heures, Paul Walsh a visé juste en faisant de Diageo un champion de la rentabilité, n’hésitant pas à appliquer de brusques augmentations de tarifs sur ses signatures phares. « Notre stratégie consiste à faire croître des marques haut de gamme », résume-t-il sur le site Internet de Diageo en s’intéressant aux marges plus qu’aux volumes. En France, où la clientèle est moins sensible qu’ailleurs à l’image des produits, cette politique de valorisation lui a d’ailleurs coûté des parts de marché...

Décrit par ses proches comme direct, franc et pragmatique, ce fils unique de 54 ans a fait toute sa carrière dans l’alimentaire. Dans les boissons alcoolisées mais également sur des marchés marketés comme l’épicerie et la restauration rapide. Au cours d’une dizaine d’années passée aux Etats-Unis, Paul Walsh a en effet dirigé Pillsbury, propriétaire alors de Géant Vert, Old El Paso, Häagen-Dazs et de la chaîne Burger King. Une expérience qui a « américanisé » le natif de Manchester selon les cadres du groupe britannique. Lesquels lui reconnaissent un incontestable esprit de leader. « Nous sommes numéro un dans de nombreux pays. J’ai du mal à prononcer l’expression numéro deux », confie Paul Walsh à la rédaction du Sunday Times. Il aurait même acquis très tôt ce goût du challenge. Adolescent, il rêvait de voler pour la Royal Air Force avant d’obtenir sa licence de pilotage… dans le cadre de ses loisirs. « Car ce qui l'intéresse, c’est le frisson des affaires », rapporte le Sunday Times. Et le grand frisson rend même amoureux. « J’adore mon entreprise », révèle-t-il par ailleurs au Telegraph.

Reste que faire du business ne consiste pas seulement à accroître le chiffre d’affaires ou même la rentabilité des produits. C’est aussi savoir réaliser des acquisitions. Pernod Ricard ne s’y est pas pris autrement pour venir chatouiller son meilleur ennemi. Les deux groupes ont d’ailleurs participé conjointement à la reprise de Seagram en 2001, permettant alors à Diageo de récupérer le rhum Captain Morgan.Malchanceux sur le dossier Absolut, Paul Walsh s’est rattrapé en prenant 50 % du capital de la vodka Ketel One, célèbre aux Etats-Unis. Il a également acquit le whiskey irlandais Busmills et négocié la distribution internationale de la tequila Jose Cuervo avec des exceptions comme sur le marché français.

La France est aussi la destination où l’on lui prêtait encore l’an dernier des visées sur les champagnes et les spiritueux de LVHM... Un gros morceau de 2,7 milliards d’euros que Paul Walsh connaît parfaitement. Et pour cause : Diageo et Moët Hennessy ont associé leur distribution en France dès la création du groupe britannique !Toujours du côté des transactions possibles, la cession de la marque Guinness fut un temps évoquée. Mais Paul Walsh aime certainement trop la bière, qu’il consomme au pub au milieu de buveurs moins notoires. Et peut-être vêtu d’un simple blouson de cuir qu’il porte parfois jusqu’à son bureau londonien.

Un conducteur sobre

Enfin, tout en cherchant à recruter de nouveaux consommateurs - c’est le but de tout entreprise -, Diageo veut aussi s’illustrer sur le terrain de la prévention et de l’usage responsable. Celui qui a cautionné le lancement de Smirnoff Ice, boisson légère et sucrée à base de vodka accusée de cibler les adolescents, assure n’avoir pas touché à l’alcool avant ses 18 ans. Ce conducteur de Range Rover, de Porsche et de vieilles Jaguar apprécie peu l’ivresse et encore moins l’ivrognerie. Par choix et par raison. « Nous ne voulons pas que les gens boivent de façon excessive au point que cela affecte notre développement, glisse Paul Walsh à The Independent. D’ailleurs, seulement 1 % des buveurs posent problème ». Cela ne l’empêchera pas de se détendre en appréciant ses propres marques. Il a le choix.

Jean-Louis Laboissière

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